Chevrolet Corvette Z06

En attendant leur arrivée en Europe, premier contact avec la Corvette C8 Z06 et le plus puissant V8 atmosphérique du monde !

Ollie MARRIAGE
Publié le : 3 mars 2023

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« La Corvette Z06 est une supercar hautement aboutie, aussi compétente que passionnante. C’est aussi un magnifique chant du cygne pour le V8 atmo »

Les plus V8 mémorable, performances et efficacité, polyvalence préservée
Les moins Pas assez caractérielle ? Style extérieur et intérieur compliqué, consommation

Ah, la Corvette Z06, écrin du plus puissant V8 atmosphérique du monde.

Vous avez bien révisé. En même temps, c’était écrit dans le chapeau… Précisez quand même « de série ». Et vous pouvez rajouter « de l’histoire » : il n’y a jamais eu de voiture de route avec un V8 atmo plus puissant que celui de la Corvette C8 Z06. Pas même chez Ferrari.

Des chiffres ?

J’annonce : 679 ch à 8 400 tr/min, 623 Nm à 6 300 Nm. Soit plus que le légendaire V12 6.1 BMW de la McLaren F1.  Ce V8 LT6 5.5 à carter sec et vilebrequin plat n’a rien à voir avec le 6.2 de la Corvette Stingray (à l’essai ici). Il dérive directement du moteur de la C8.R GTLM de course. Il est exotique aux standards américains : soupapes et bielles en titane, soupapes d’échappement traitées au sodium, 8 600 tr/min… C’est l’aspect le plus impressionnant de la Corvette Z06.

Donc la Z06, c’est juste une Corvette C8 avec un moteur surpuissant ?

Houla, non. 2023 marque les soixante ans d’existence du label Z06, réservé aux versions hardcore de la plus emblématique des sportives américaines. Hormis le moteur, la C8 a donc comme ses devancières été revue de fond en comble. Déjà, elle est 90 mm plus large que la Stingray, ce qui implique de nouvelles ailes pour enrober des pneus plus larges, et une nouvelle géométrie de suspension.

Les roues et les freins ont grandi. Le différentiel électronique et l’amortissement magnétorhéologique, optionnels sur la Stingray, sont ici livrés en série. Les ressorts sont plus fermes, le rapport final de la boîte à double embrayage et huit rapports a été raccourci. Les pneus arrière sont de monstrueux boudins de 345 de large, les freins sont signés Brembo et il y a 165 kg d’appui à 300 km/h (si vous vous dites que ce n’est pas beaucoup, vous avez raison). Pour plus de détails techniques croustillants, allez voir par là.

Ah oui, ils ont tout de même bien revu leur copie… La Z06 est plus légère, aussi ?

Non, elle est un peu plus lourde : 1 561 kg au lieu de 1 530 kg. À sec. Tablez sur 1 700 kg tous pleins faits. Et ça, c’est pour le coupé. Le cabriolet sera encore plus lourd, mais il y aura de quoi hésiter avant de signer le chèque puisque le coupé est déjà en réalité une targa, comme sur la Stingray. Le principal intérêt du cabriolet est paradoxalement de pouvoir rouler sous un toit mais glace arrière baissée, pour mieux profiter des vocalises du V8.

Il chante si bien que ça ?

Oh oui. C’est absolument grisant. Il n’a peut-être pas tout à fait l’intensité de celui d’une Ferrari 458 (la dernière supercar V8 atmo), ni la sauvagerie d’un flat 6 de 911 GT3 (allez donc voir la vidéo en bas de cette page), mais c’est un moteur d’anthologie, au coffre titanesque et à la hargne inépuisable. Il bondit en un éclair en haut du compte-tours, répond au quart de poil. La suralimentation a beau avoir fait des progrès spectaculaires, rien ne vaut encore un atmo de bonne race pour la bande-son et la réactivité.

Chevrolet ne se cache d’ailleurs pas d’avoir fait du reverse-engineering à partir d’un 4,5 l de Ferrari 458 pour comprendre ce qui le rendait si exceptionnel. C’est un moteur de légende, un ténor de 570 ch élu Moteur de l’Année quatre fois. 14 ans après, Chevrolet n’a d’ailleurs toujours pas réussi à égaler les 125 ch/l de la Ferrari. Un rendement de 122 ch/l reste éminemment respectable.

Et les chiffres de performances le sont tout autant : 0 à 97 km/h en 2,7 s, 314 km/h en pointe. Une fois accoutumé à la vigueur et au son du V8, on réalise cependant qu’il est étonnamment bien élevé.

Hein ? Mais je n’ai pas envie que mon V8 américain à 8 600 tr/min soit « bien élevé », je veux un truc de bonhomme !

N’empêche : en cruising, ce monstre ronronne gentiment, la boîte est onctueuse et jamais hésitante. On oublie sans problème qu’on a un vrai moteur de course dans le dos.

Mais vous n’avez pas tort, ce vernis de civilisation lui enlève un tout petit peu de caractère. Mais là, on chipote : je préférerais toujours ce moteur à n’importe quel V8 turbocompressé. Et puis ce côté bonne pâte a le mérite de désinhiber un peu le conducteur qui serait intimidé par la fiche technique.

Et quand on titille la Z06, elle finit quand même par s’énerver ?

Les réactions millimétrées à l’accélérateur, l’absence de vibration, l’arrivée progressive de la puissance… Tout montre une machine extrêmement bien développée. Les liaisons au sol laissent la même impression. Il y a juste ce stupide volant hexagonal à la jante toute molle, qui n’a rien à faire dans une voiture de sport. À cause de lui, au début, on pourrait croire que la Z06 est un peu distante, qu’elle ne veut pas tout donner malgré son moteur incroyable.

Le doute est levé au premier virage. Dès l’inscription, la Corvette est complètement avec vous. La direction s’alourdit, il y a un poil de roulis – parfaitement contrôlé –, la suspension se charge et le pneu dessine une courbe bien propre autour de la corde. Pas de chichis, juste la sensation d’une communication limpide entre le volant et l’extérieur de la bande de roulement. C’est exactement ce qu’il faut pour la confiance. Et cela démontre une fois de plus une mise au point aux petits oignons.

Et sur circuit ?

Il faut d’abord avoir à l’esprit que la Z06 que j’ai conduite était un cabriolet, donc la version la plus tendre. Pour faire de la piste, on préférera évidemment un coupé avec le pack Z07 qui inclut une suspension 15 % plus ferme, des freins carbone-céramique plus gros, un aileron arrière qui double l’appui à 333 kg (toujours anecdotique à côté des 860 kg de la dernière 911 GT3 RS) et des Michelin Cup 2R. Ainsi que la possibilité d’opter pour des roues en carbone (- 18,6 kg).

Ma voiture du jour était un cabriolet en Pilot Sport 4S, ce qui ne l’a pas empêchée de sacrément bien s’en tirer. Et je dis ça alors que j’avais une 911 GT3 en Cup 2 à côté pour comparer… Dans cette configuration, la Z06 est moins agile et moins stable que la Porsche, mais elle reste à la fois très équilibrée et joueuse. On la rattrape facilement quand on dépasse les limites, les freins ne faiblissent jamais, et on ne se lasse décidément pas de ce moteur.

Moteur qui lui permet d’ailleurs de crucifier la Porsche en ligne droite. La Corvette a beau être nettement plus lourde, elle domine l’allemande en rapport poids/puissance, et ça se voit dès qu’il y a de la place pour lâcher les chevaux. Même dans les virages, elle n’est pas si loin de la GT3 en grip grâce à ses pneus 30 mm plus larges.

Mais sur un tour, laquelle vous choisissez ?

Pour moi, ce serait la GT3. Elle reste plus engageante, plus tactile, plus subtile, plus gratifiante à conduire. Mais je pense que beaucoup trouveraient la Corvette plus facile. Et sur la route, je pense franchement que c’est la meilleure des deux.

Déjà, elle est incroyablement confortable. Les amortisseurs magnétorhéologiques ont une capacité de filtrage que n’offre pas la plus radicale des 911 (hors RS), qui reste raide et brutale H24. La Z06 est mieux isolée et ses différents modes de conduite (accessibles via un bouton « Z » personnalisable sur le volant) lui permettent de varier considérablement les registres grâce à des différences bien marquées.

La voiture idéale pour un roadtrip, donc ?

Absolument. Il faudra juste prévoir de la marge sur le budget carburant. Sur 725 km, j’ai fait du 18,3 l/100 km de moyenne (du calme, ça inclut la session circuit), à comparer aux 13,5 l/100 km de la Porsche. Sinon, c’est une voiture relaxante à conduire, les sièges maintiennent bien – dommage qu’ils soient montés un peu haut – et il y a un coffre utilisable à chaque extrémité. Le dessin du mobilier demande un peu d’habitude et le passager se sentira mis à l’écart derrière la muraille de la console centrale qui accueille les commandes de clim.

L’ensemble est toutefois bien construit, ça ne vibre ni ne grince nulle part même dans le cabriolet, dont le toit se manœuvre facilement en mouvement. Bref, la Z06 ne vous compliquera pas la vie et pourra parfaitement être utilisée comme une GT. Il suffira de changer de mode pour réveiller le V8 et lui faire faire un peu d’exercice quand le terrain s’y prêtera. C’est une voiture merveilleusement polyvalente.

Mais peut-on la qualifier de premium ?

Je l’ai dit, elle est très bien construite. Aucun bruit parasite, des matériaux de qualité. En revanche, le style, comment dire… Ça n’a tout simplement pas la sophistication d’une Porsche ou d’une Ferrari. La carrosserie est torturée, il faut bien l’avouer. Et ça risque d’être rédhibitoire, en tout cas en Europe, face à ces marques prestigieuses.

Elle compense quand même par son prix, non ?

Oui, elle conserve cet argument. Aux Etats-Unis, la Z06 attaque à 106 695 $ en coupé, 8 000 $ de plus en cabriolet. Contre presque 170 000 $ pour une 911 GT3… Chevrolet a laissé entendre qu’elle arriverait en Europe, mais allez savoir quand. Le jour où elle débarquera, gardez-vous bien de la snober, s’il vous plaît. Et ce même si elle risque de perdre quelques plumes dans l’opération (il est question de l’amputer de son échappement central pour des questions de normes sonores, par exemple). C’est une supercar hautement aboutie, compétente et passionnante. Et un magnifique chant du cygne pour le V8 atmo.

En savoir plus à ce sujet :

Chevrolet Corvette Z06

Année
2023
Type de moteur
Thermique
Longueur
4688 mm
Largeur
2025 mm
Hauteur
1235 mm
Poids
1700 (est.) kg
Boîte de vitesses
double embrayage
Nombre de rapports
8
Transmission
propulsion
Puissance
679 ch
Couple
623 Nm
0 à 100 km/h
2,9 s.
Vitesse max
314 km/h

V8

Type
Thermique
Nombre de cylindres
8
Cylindrée
5463 cm³
Alimentation
atmosphérique
Type carburant
essence
Puissance
679 ch
Couple
623 Nm