Hypercar électrique, SUV : le point sur l’avenir de Lotus

Le PDG de Lotus nous explique comment la marque prépare son retour dans l’élite

Charlie TURNER • Niels de GEYER
Publié le : 1 avril 2019

Les allers-retours à l’usine Lotus de Hethel pour écouter un nouveau patron exposer son plan de relance sont malheureusement devenus quelque chose d’un peu trop fréquent durant la dernière décennie.

Cependant, depuis cinq mois qu’il est à la tête de Lotus, le nouveau PDG Phil Popham n’a pas la langue dans la poche. Il faut dire qu’il a des raisons d’être optimiste : en 2017, Geely, déjà propriétaire de Volvo et constructeur des nouveau taxis londoniens, est devenu actionnaire majoritaire de Lotus à la place du malaisien DHB-Hicom. En septembre 2018, Phil Popham a été nommé PDG, et il s’est de toute évidence retroussé les manches. En entrant dans l’enceinte du site de Hethel, on prend conscience qu’il se passe des choses ici. Et notre interview nous confirmera que ce n’est qu’un début.

Après 25 ans chez Jaguar Land Rover, qu’il a quittée au poste de directeur des opérations globales, Popham a rejoint en 2014 les yachts Sunseeker, dont il a tenu la barre quatre ans avant d’être approché par Geely pour diriger Lotus.

Popham reconnaît qu’il y avait « très peu de constructeurs automobiles » pour lesquels il aurait envisagé de travailler. Mais « l’alliance du blason Lotus, marque britannique légendaire au savoir-faire immense, et du sérieux de Geely dans sa démarche » l’a convaincu de prendre ses quartiers dans le Norfolk.

Tandis que le site actuel est en train d’être agrandi, un nouveau centre d’expérience client, localisé près du circuit homologué FIA, va bientôt être construit. C’est ici que seront accueillis les visiteurs, et qu’ils auront un accès direct au circuit pour des essais et des baptêmes.

En réalité, le site historique n’a jamais cessé de s’étendre au fil de ses sept décennies d’existence. Il n’a aujourd’hui plus rien à voir avec les plans originaux de Colin Chapman. Dans le cadre de l’expansion, l’héliport, l’étang et les fontaines, créés par Chapman lui-même mais hélas laissés à l’abandon, seront remis à neuf.

En plus du centre d’expérience client, Lotus a lancé la création d’un pôle Héritage incluant un musée et un restaurant qui prendront place dans l’entrée – rénovée – de l’ancienne usine, avec sa façade originelle. La salle de réunion, avec son toit ultraléger lui aussi conçu par Chapman, y sera intégrée.

Mais pour maintenir la marque en vie, ressasser le passé ne suffit pas : il faut se tourner vers l’avenir. Et, cette fois, passer à l’acte. En 2018, Lotus a vendu 1 630 voitures. Popham estime que l’usine actuelle est en mesure d’en produire 5 000, et nous explique avoir passé les cinq derniers mois à « négocier la stratégie et les investissements nécessaires ».

« L’ADN de Lotus est compatible avec d’autres types de véhicule »

Hethel restera le cœur de Lotus Cars et de la production des voitures de sport. Mais si la marque « se lance sur différents fronts », il faudra envisager de déménager la production. Reste à savoir où dans la galaxie Geely mais, vu l’échelle de l’entreprise, tout ne pourra pas être fabriqué dans le Norfolk.

Cependant, Popham se plaît à nous rappeler que « l’ADN d’une Lotus, et la façon dont on l’applique à une voiture, seront toujours définis depuis cet endroit, et fondés sur l’expertise et l’expérience de l’équipe. »

Popham et ses complices ont un plan pour les dix prochaines années qu’il résume ainsi : « Visez suffisamment loin, mettez-vous d’accord sur ce que vous voulez devenir et comment vous voulez y arriver, et le plan produit s’imposera de lui-même

L’offensive produit sera amorcée l’année prochaine avec une nouvelle voiture de sport. Elle perpétuera l’excellence des liaisons au sol maison mais avec un sens pratique un peu plus développé qu’à l’accoutumée : accès à bord, infotainment, qualité des matériaux… L’idée fondamentale est d’en faire une proposition plus facilement utilisable au quotidien que les Lotus actuelles. Pour arriver en temps et en heure, cette nouvelle auto sera basée sur une plate-forme d’Evora revue en profondeur.

Elle sera suivie par toute une nouvelle gamme dont l’architecture, inédite, est en cours de développement. « D’abord cette nouvelle voiture, ensuite la nouvelle plate-forme », assure Popham.

Dans un monde automobile désormais obsédé par la course à l’électrification et l’amélioration de l’autonomie, Lotus sera forcé de se confronter à ces problématiques. Néanmoins, Popham a un point de vue rassurant sur la question. « Je suis persuadé que la demande pour des autos que vous pouvez vraiment conduire, avec lesquelles vous pouvez vous amuser le week-end ou sur un circuit en toute indépendance, augmentera à mesure que les voitures autonomes s’accapareront les transports du quotidien », dit-il.

Il est cependant évident que l’entreprise ne peut survivre en ne produisant que des voitures de sport. Lamborghini, Bentley, Rolls-Royce, et bientôt Aston Martin et Ferrari se sont par exemple convertis au SUV. Lotus empruntera-t-elle aussi cette direction ?

« Je pense que l’ADN de Lotus est compatible avec d’autres types de véhicule, explique Phil Popham. Évidemment, les notions de dynamisme, de performance et de légèreté n’auraient plus tout à fait la même signification sur d’autres segments, mais cela ne nous empêcherait pas d’y appliquer notre savoir-faire. »

Une fois le plan produit et les investissements verrouillés pour les cinq prochaines années, avec un site à réhabiliter, une nouvelle voiture de sport à mettre au point, une plate-forme et tout une gamme à développer, Lotus va être très, très occupé. Comme si tout cela ne suffisait pas, il se murmure qu’une hypercar électrique à plus d’un million d’euros serait à l’étude dans les tréfonds de Hethel, en collaboration avec Williams (et Polestar, autre filiale de Geely ?). Même si Popham se refuse à commenter la rumeur, ce serait le timing idéal pour lancer une auto aussi emblématique. Avec la généralisation des batteries, il serait en outre utile de rappeler au bon souvenir de l’industrie automobile le fameux « light is right » de Colin Chapman.

En effet, tandis qu’on semble se diriger vers des voitures électriques qui se baladent avec plusieurs quintaux de trop pour offrir une autonomie de 500 km qu’elles n’utiliseront que rarement en pratique, un peu de créativité et de hauteur de vue seraient pas de refus pour envisager de nouvelles solutions au problème. En combinant la puissance de feu de Geely, le leadership de Popham et un marché qui ne demande pas mieux qu’une approche innovante pour accompagner l’évolution de la voiture de sport, c’est clairement le moment ou jamais pour Lotus.

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