Un SUV premium familial convertit à l’électricité. Pas le plus performant de son (micro) segment, mais sûrement le plus cohérent.
L’e-tron est une Audi très conventionnelle. Elle n’affiche pas son électrification comme un titre de gloire avec un design volontairement clivant ou décalé, bien au contraire. L’idée étant de rassurer la clientèle habituelle des acheteurs de SUV de faire le grand saut. Malin…
D’un gabarit un peu plus petit qu’un Q7, l’e-tron ne peut accueillir que cinq personnes à son bord et repose sur une plateforme MLB Evo très conventionnelle mais lourdement modifiée pour l’occasion. Il y a un moteur électrique sur chaque essieu, celui à l’arrière étant légèrement plus puissant, pour un rendement total de 408 ch et 664 Nm. Et entre les deux on trouve un pack de batteries de 95 kWh pesant la bagatelle de 700 kg.
Surpris que ce ne soit pas une plateforme électrique spécifique ? C’est dans les tuyaux, le projet baptisé PPE en interne est développé de concert avec Porsche. Cette plateforme servira de base à tous les gros véhicules électriques du groupe VW. Mais Audi était pressé de sortir (enfin) un VE, d’où le choix d’une plateforme modifiée.
Mais assez parlé stratégie industrielle. L’Audi e-tron a un suffixe : 55 (la bizarre désignation maison pour les voitures développant entre 340 et 410 ch). D’autres versions moins puissantes seront introduites un peu plus tard, dont probablement une variante avec des batteries plus petites pour faire baisser le prix du ticket d’entrée. Et une autre avec trois moteurs pour aller taquiner les Tesla les plus rapides.
En l’état, cette Audi n’est pas rapide. Du moins pas selon les standards instaurés par Tesla. L’e-tron met 5,7 s pour passer de 0 à 100 km/h malgré toute sa cavalerie, la faute à un poids astronomique de 2490 kg. Est-ce important ? Pas vraiment, ce n’est pas un SUV sportif et ses performances sont à comparer à celles de SUV traditionnels, c’est la cible. Dans ce contexte bien précis, l’e-tron n’est ni lourd ni lent. Il est notoirement plus véloce qu’un V6 diesel et le couple immédiat des moteurs électriques masque habilement son surcroît pondéral. Il est alerte au démarrage et a suffisamment de réserve pour les dépassements sur autoroute.
Même sans les barres antiroulis actives de la SQ7, le comportement de l’e-tron est très équilibré, sans prise de roulis excessive grâce à un centre de gravité presque au niveau du plancher. Les transferts de masse ne sont jamais caricaturaux, le grip est plus abondant que ce qu’on imagine au premier abord et le choix de pneumatiques à l’épaulement classique (255/50 R20) combiné à des suspensions pneumatiques permet à l’e-tron d’offrir un confort de roulage de premier ordre.
Mais le manque de communication du châssis donne l’impression d’être au volant d’une PlayStation : rien dans la direction, rien dans la pédale de frein. D’ailleurs, les ralentissements inférieurs à 0,3 g (c’est beaucoup plus que ce que vous pensez) sont pris en charge par la régénération des moteurs électriques. Au-delà, les freins classiques prennent le relais. La transition est insensible à la conduite.
Et puis il y a le silence. On dit souvent que les véhicules électriques sont silencieux, mais celui-ci l’est vraiment car même les habituelles nuisances sonores sont inaudibles. Les bruits de roulement ? Nope, les pneus incorporent un isolant à base de mousse. Les sifflements aérodynamiques ? Non plus, les caméras qui remplacent les rétroviseurs classiques sont muets, réduisent la largeur totale de 15 cm et permettent d’abaisser le Cx de 0,28 à 0,27.
Tout ceci mis bout à bout fait que l’e-tron distille un agrément de conduite remarquable.
Pas d’obscurs modes de conduite ici, ni de graphiques sans queue ni tête pour vous montrer à quel point vous êtes efficient (ou pas). L’e-tron se contente d’un classique sélecteur offrant le choix entre Off-road, Efficience, Confort et Dynamique. Les seules différences notables en chaque mode sont les suivantes. Efficience optimise l’autonomie de batteries, mais bride beaucoup trop l’arrivée de la puissance au démarrage. En Dynamique, les suspensions sont un chouia trop fermes pour être utilisables dans toutes les conditions, tandis qu’en Off-road les suspensions pneumatiques se lèvent de 3,5 cm pour optimiser la garde au sol. Du coup, on roule en Confort 90 % du temps.
Le design intérieur de l’e-tron diffère sensiblement de celui d’un Q7, c’est plus joli mais bien moins pratique. Le seuil du coffre est très haut et l’angle fermé des montants de custode vient rogner sur l’espace de chargement (660 l dont 60 sous le plancher).
Il y a aussi un coffre à l’avant. Il n’est pas bien grand mais il permet d’y entreposer les câbles de charge, ce qui tombe très bien vu que les prises sont au niveau du pied du pare-brise. L’espace à l’arrière est décent pour deux des trois passagers potentiels. Celui du centre devra composer avec une console centrale bien trop envahissante pour y installer une femme en jupe courte avec dignité.
Il y a cinq écrans dans l’e-tron, deux tactiles sur la console centrale, le désormais incontournable Virtual Cockpit, et deux de plus pour afficher ce que voient les caméras-rétroviseurs. Le système n’est pas parfait. On se fait vite à leur position inhabituelle, on peut ajuster l’angle de vue et la luminosité mais l’angle de vue est trop étroit (au moins, on peut bouger la tête avec un rétroviseur traditionnel pour changer son angle de vue, c’est impossible ici) et les écrans digèrent mal un fort ensoleillement.
Comme d’habitude chez Audi, la position de conduite est parfaite et la finition irréprochable. Et il y a de fortes chances que vous laissiez beaucoup de traces de doigts sur les écrans tactiles, l’interface est intuitive (le GPS beaucoup moins) mais très dense. Pensez donc à regarder la route de temps en temps.
Pour rouler en électrique chez Audi, il vous faudra débourser un minimum de 82 600 € (sans déduction des 6000 € de bonus écologique) mais on ne connaît toujours pas le niveau d’équipement de série sur les versions françaises. À titre de comparaison, un Q7 V6 TDI 50 (286 ch) en finition S Line est affiché 75 360 €, soit un delta de 1240 € avec l’e-tron bonus écologique inclus.
Le marché semble prêt pour ce genre de véhicule, près de 20 000 précommandes ont déjà été enregistrées chez Audi et Mercedes proposera un produit équivalent l’an prochain : l’EQC.
Audi annonce une autonomie de 400 km pour ses batteries de 95 kWh. Les prochaines générations équipées du châssis PPE seront plus légères et devraient donc logiquement avoir une autonomie supérieure. En conditions réelles d’utilisation, vous devriez être capable de parcourir aux alentours de 300 km entre deux charges, moins si vous empruntez l’autoroute. Pas encore l’idéal pour partir en vacances en famille donc, d’autant que le réseau de bornes de charge rapide est quasiment inexistant aujourd’hui.
L’e-tron n’est peut-être pas très imaginative, ou ne se distingue pas de la masse des SUV traditionnels, mais c’est volontaire de la part d’Audi. Pour l’allemand, c’est un facteur-clé dans la décision d’achat chez ceux qui veulent acheter un véhicule électrique. C’est avant tout une Audi, facile à appréhender, flatteuse pour la rétine à défaut d’être originale, impeccablement assemblée et développée qui “par hasard” se trouve être aussi un véhicule électrique. Un choix à contre-courant de Tesla et (dans une moindre mesure) de Jaguar avec son i-Pace. Vivement le comparatif…
Un SUV premium familial converti à l’électricité. Pas le plus performant de son (micro) segment, mais sûrement le plus cohérent.
En savoir plus à ce sujet :
Nous utilisons des cookies pour vous réaliser des statistiques de visite sur notre site. Si vous continuez à utiliser ce dernier, merci d'accepter l'utilisation des cookies.J'accepte