Benz Patent Motorwagen

Ceci est la toute première voiture de l'histoire. 135 ans plus tard, a-t-elle encore des choses à nous apprendre ?

Tom Ford
Publié le : 1 janvier 2021

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Oui, on va plus vite en courant. Oui, la suspension est littéralement en bois, et le répertoire dynamique est... limité. Mais cet engin étonnant procure une expérience de conduite hors norme, dont on peut imaginer à quel point elle a bouleversé la donne il y a 130 ans.

Au volant

Avant de rouler, il faut démarrer, et c’est un poil plus compliqué que de nos jours. On met le contact en tournant une vis sous le siège, on ouvre trois petits robinets pour la lubrification. Après ça, il faut surtout du muscle pour faire tourner le volant-moteur suffisamment fort pour contrer la compression du cylindre et amorcer le mouvement. Et attention : si vous ne prenez pas assez d’élan, le retour est suffisamment violent pour briser un poignet. Mais soudain, avec une gentille pétarade et un petit soupir, la Benz commence à hoqueter jusqu’à se caler sur son régime.

C’est le moment de monter sur le banc, de faire ses contrôles (vous aurez noté l’excellente visibilité périphérique) et de pousser délicatement le levier vers l’avant, jusqu’à ce que l’engin se mette en branle. La direction fait appel à un système de crémaillère, et on peut voir la roue dentée à l’oeuvre sous la petite poignée verticale du guidon. Étrangement, la conduite est beaucoup plus naturelle qu’on l’imagine. C’est instable, pas toujours très rassurant – il faut passer trèèès lentement en virage, sous peine de glisser irrésistiblement le long du banc – mais une curieuse intimité s’établit immédiatement avec la voiture, le moteur qui s’ébroue juste sous vos fesses, l’odeur d’huile chaude, la satisfaction de savoir comment tout ça fonctionne pour vous permettre d’avancer. Dans les voitures modernes, tout se passe en coulisse, c’est magique, il n’y a plus vraiment de contact avec la mécanique. Avec la Benz Motorwagen, vous faites partie intégrante du processus.

D’ailleurs, on est dans un univers tellement éloigné qu’il est difficile de se raccrocher aux critères habituels d’un essayeur moderne. Le « confort » dépend surtout de l’épaisseur de votre pantalon, la « tenue de route » est uniquement corrélée à la pesanteur de l’engin et certainement pas au frottement des pneus en gomme pleine. Quant aux performances… il y en a. Heureusement, la Benz ne pèse que quelques centaines de kilos.

Malgré tout, il n’est pas difficile de comprendre à quel point cette chose était révolutionnaire. Rouler là-dedans à une époque où le cheval assurait encore l’essentiel des transports quotidiens, ce devait être comme arriver en jet-pack de nos jours.

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