Mercedes-AMG SL63 S E Performance

Un roadster hybride de 816 ch... mais pour qui ?

Ollie KEW
Publié le : 25 février 2025

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« Une somme de technologie époustouflante, associée à la bande-son du V8 qui nous manque tant sur la C63 »

Les plus Performances hallucinantes, (double) personnalité, un cabriolet à la démesure d'AMG
Les moins Poids, motricité, ergonomie... et surtout, à quoi bon ?

Aïe, une autre AMG hybridownsizée ?

Eh non ! Ce monstre prouve que l’électrification n’a pas eu raison de l’esprit AMG : produire quelque chose pour le seul plaisir de le faire.

Un peu de contexte, peut-être ?

Aux jours heureux, AMG commercialisait essentiellement des léviathans à moteur V8. Mais ils savaient que pour certains clients – ceux qui se contentaient d’aller à la dernière page du catalogue et de dire « celle-là » –, un gros V8 ne suffisait pas.

Pour cette élite au budget sans limite, AMG a alors sorti d’absurdes mégalodons V12. Les S65, SL65, CL65 et autres G65. Des dinosaures au moteur de paquebot, avec assez de couple pour relancer l’économie d’un pays moyennement développé.

Mais à cause des moyennes CO2, et parce que les V8 turbocompressés les ont rattrapé en puissance, AMG a arrêté les frais sur les V12, désormais réservés à une poignée de Classe S Maybach.

Mais alors, comment produire une AMG aux performances foncièrement inutiles en 2025 ?

En prenant un SL63 – pas tout à fait un poumon, à la base – et en lui greffant un moteur électrique absolument pas nécessaire sur le train arrière. Oui, parce que quelqu’un chez AMG a décidé qu’il y avait encore de la place au-dessus des 585 ch et 203 000 € du SL63…

Dans cette niche de marché stratosphérique, ils ont donc mis sur orbite un SL63 S E Performance animé par un V8 4 l biturbo de 612 ch ET par un moteur électrique de 204 ch, entraînant l’essieu arrière avec sa propre boîte à deux rapports. Même en mode 100 % électrique, c’est déjà vif. Ajoutez un V8, et certaines hypercars peuvent commencer à se faire du souci.

Des chiffres ?

Cette motorisation hybride sort un total de 816 ch et… 1420 Nm. Un SL avec la puissance d’une Pagani et assez de couple pour ressusciter MySpace et ramener les Girondins de Bordeaux en Ligue 1.

Ah quand même. Mais il a bien fallu faire des compromis pour arriver à ça, non ?

Quelques-uns. Comme à l’époque des V12, d’ailleurs : à la fin, ces versions étaient souvent moins véloces que les V8 car nettement plus lourdes et incapables d’enquiller les rapports aussi vite.

Or intégrer une batterie de 4,8 kWh dans un cabriolet déjà grassouillet avec sa transmission intégrale, ses roues arrière directrices, son antiroulis hydraulique actif, sa capote électrique et ses deux sièges arrière complètement anecdotiques, ça mange la moitié du coffre qui tombe à 110 l. L’équivalent d’un top case sur une moto.

Il y a à peine assez de place pour caser les câbles de recharge, au rôle essentiellement symbolique puisqu’ils servent à regagner les 12 petits kilomètres d’autonomie électrique sans consommer de pétrole.

Le poids ? Par rapport au SL63 non hybride, le SL63 S E Performance gagne certes 231 ch mais aussi 225 kg. Soit presque un kilo par cheval supplémentaire, donc un rapport poids/puissance quasi inchangé.

Il doit bien y avoir au moins un intérêt fiscal ?

Oui, mais non. Mercedes annonce 180 g/km de CO2. C’est 120 g de moins que le SL63, ce qui se traduit par un malus de « seulement » 32 935 € au barème actuel (+ 7 900 € de malus au poids) contre 70 000 € pour la version non hybride (+3 065 € de malus au poids). Mais comme l’hybride coûte presque 30 000 € de plus (à partir de 232 400 €), on arrive in fine à moins de 3000 € d’écart tout compris en faveur de la version E-Performance. Mais quand on est prêt à payer plus de 270 000 € avant options pour un cabriolet, c’est probablement un détail mineur.

Et si vraiment le bilan environnemental de votre cabriolet de 800 ch et plus de 2 t vous préoccupe, sachez que la nouvelle Bentley Continental GTC hybride rechargeable se contente de 31 g/km malgré ses 782 ch, échappant ainsi au malus. Si l’on est en quête de décadence écologiquement correcte et qu’on veut être cohérent, c’est donc à Crewe qu’il faut aller faire son shopping, pas à Affalterbach.

Mais alors, à qui s’adresse cette voiture ?

À quelques riches fous furieux, inconditionnels des découvrables surpuissantes. À ce niveau de performances (0 à 100 km/h en 2,9 s) et de prix, on sort de toute rationalité. Mais au moins, ça veut dire qu’AMG a retrouvé son grain de folie.

Au volant, c’est comment ?

Brutal. Si la route est humide ou froide, ça patine des quatre fers en troisième malgré les 2,3 t et la transmission intégrale. On a neuf rapports à disposition, mais ils sont si rapprochés qu’on passe son temps à se cogner au rupteur. Les rétrogradages sont trop lents, mais on trouve vite la parade : il suffit de ne pas changer de rapport, on peut tout faire en quatrième.

Personne ne s’embêtera à brancher une hybride rechargeable n’offrant que 12 km théoriques d’autonomie électrique. C’est donc le V8 qui doit s’occuper de charger la batterie, et on aura du mal en pratique à rester sous les 14 l/100 km. Mais le boost électrique est toujours disponible, et pouvoir sortir du garage de bon matin sans réveiller le V8 – et tout le quartier – est appréciable.

AMG a doté le SL ultime d’une suspension Active Ride Control à éléments hydrauliques interconnectés. Sur le SL63 standard, le toucher de route n’était pas formidable, comme si la voiture avait du mal à choisir sa vocation entre la Croisette et le Nürburgring.

Ils ont dû bien revoir leur copie car c’est maintenant décemment souple en mode Comfort, tout en gommant parfaitement l’embonpoint du SL dans le sinueux. En tout cas la première fois. Un virage ? Aucun problème. Mais si les pif-pafs s’enchaînent, la masse finira par reprendre le dessus sur les gadgets du SL. Néanmoins, on souhaite bien du courage à une DB12 Volante ou une Conti GTC pour tenter de suivre un SL déchaîné.

Et la vie à bord ?

L’habitacle du SL n’a pas la classe de l’Aston ou de la Bentley. C’est clinquant, autour de la même tablette tactile que sur une Classe C. Tablette qui se redresse électriquement pour réduire les reflets quand on roule décapoté, ce qui montre bien qu’un écran tactile était une solution stupide sur ce genre de voiture. L’ensemble fait à la fois maniéré et austère.

Allez, les aérateurs sont jolis. Et les sièges sont fabuleux avec leur chauffe-nuque Airscarf.

Mais je ne devrais pas en acheter une ?

Comme je l’ai dit, il est difficile de plaider la cause de cette voiture. Elle est trop chère, trop lourde, trop peu pratique, trop complexe et probablement trop performante pour son propre bien .

Mais justement, cette puissance outrancière, et l’ironie de lui avoir donné en même temps la capacité de cruiser sans un bruit dans le trafic, en font une voiture étrangement attachante au fil du temps qu’on passe avec elle.

En tant que collision de deux solution techniques, c’est une voiture très XXIe siècle, avec toutes les tracasseries désormais habituelles : les capteurs qui bipent en permanence, les boutons à retour haptique, le piano black partout, les combinaisons infinies de modes de conduite. Et pourtant…

Comme les anciennes AMG V12, elle donne l’impression d’avoir entre les mains une voiture d’initié, une machine de derrière les fagots qu’on vous vend avec un clin d’oeil. Une somme de technologie époustouflante, associée à la bande-son du V8 qui nous manque tant sur la C63.

En l’absence d’une Black Series, on tient là le produit le plus excessif du catalogue AMG actuel. Et hormis la trappe de charge sous le feu arrière droit, il est strictement identique à n’importe quel autre SL. Ça aussi, c’est chouette. Sauf bien sûr si vous voulez absolument que tout le monde sache que vous avez acheté le plus cher.

En savoir plus à ce sujet :

Mercedes-AMG SL63 S E Performance

Année
2024
Prix mini
232400 €
Type de moteur
Hybride rechargeable
Longueur
4705 mm
Largeur
1915 mm
Hauteur
1354 mm
Poids
2195 kg
Boîte de vitesses
automatique
Nombre de rapports
9
Transmission
intégrale
Puissance
816 ch
Couple
1420 Nm
0 à 100 km/h
2,9 s.
Vitesse max
317 km/h
Conso
7,9 l/100km
Rejets
180 g/km CO2
Capacité
4,84 net
Autonomie
12 km

Thermique

Type
Thermique
Nombre de cylindres
8
Cylindrée
3982 cm³
Alimentation
biturbo
Type carburant
essence
Puissance
612 ch
Couple
850 Nm

Electrique

Type
Électrique
Position
AR
Puissance
204 ch
Couple
320 Nm