Porsche Cayenne Coupé

Plus d'une décennie après le BMW X6, Porsche riposte enfin, et c'est du lourd

Stephen DOBIE • Niels de GEYER
Publié le : 22 mai 2019

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Si le concept de SUV coupé ne vous pose pas de cas de conscience, la version profilée du Porsche Cayenne est ce qui se fait de mieux dans le genre.

Qu’est-ce que c’est ?

Un énième ajout complètement futile au paysage automobile. Ou alors la Porsche que vous attendiez depuis des années, c’est selon. Votre point de vue – ne dites pas que nous n’avez aucun avis sur la question – dépendra de celui que vous avez sur la mode des SUV coupés.

Mettons pour l’instant de côté toute subjectivité : les marges obtenues en rabotant le toit d’un SUV sont tellement juteuses qu’on ne peut décemment reprocher à un constructeur de surfer sur le phénomène. À vrai dire, il est même étonnant que Porsche, pionnier des SUV sportifs, ait attendu si longtemps avant de s’y mettre.

Le Cayenne Coupé arrive un an après le lancement du Cayenne III. Les modifications sont nombreuses, Porsche oblige, mais le concept n’est pas bien compliqué à expliquer : prenez un Cayenne, aplatissez le toit, servez bien chaud.

Au second rang, on trouve maintenant deux sièges sport, mais vous pouvez revenir à une banquette trois places en option. Et à la place du toit panoramique en verre de série, vous pouvez cocher un pavillon en carbone si vous craignez pour votre centre de gravité. À part ça, le catalogue propose assez d’options châssis pour vous faire perdre plusieurs heures sur le configurateur en ligne (et à peu près autant de briques sur votre compte en banque), la plupart étant là pour compenser les inévitables handicaps dynamiques d’un véhicule aussi imposant.

Un poil plus long et plus lourd qu’un Cayenne standard, il est logiquement un tout petit (petit) peu moins véloce. Il offre le choix entre trois blocs essence turbo : deux V6 de 340 ch (Cayenne) et 440 ch (Cayenne S), et un V8 de 550 ch (Cayenne Turbo). Les vitesses maxi sont comprises entre 263 et 286 km/h, les 0 à 100 km/h entre 6 et 3,9 s. Toutes les versions sont associées à des boîtes automatiques à huit rapports. Aucun Diesel n’est prévu, mais une version hybride ne saurait tarder à rejoindre la gamme.

Vous craignez pour la garde au toit à l’arrière avec cette nouvelle chute de reins ? Porsche a rabaissé l’assise des sièges de 30 mm, alors que le toit n’est que 20 mm plus bas. Peur que l’aérodynamique de l’ensemble soit perturbée ? Porsche a greffé un aileron arrière mobile sur le hayon en plus du becquet. Quand on vous dit qu’ils ont tout prévu.

Il va de soi que ce Cayenne plus sportif et plus coquet est aussi plus cher, avec une différence comprise entre 5 et 7 000 euros selon les versions (à relativiser par un équipement plus riche). Il attaque à 86 000 € avec le « petit » V6 pour culminer à 149 000 € en Turbo avant options. Ce supplément est-il mérité ?

Au volant

Même si le Coupé hérite de voies plus larges et d’une aéro revue par rapport au Cayenne standard, il est aussi un peu plus lourd. Ne nous voilons pas la face, il sera donc quasi impossible de percevoir la différence sans organiser un match en direct. Et encore ne faudra-t-il pas y aller de main morte. Pour faire court, ça se conduit exactement comme un Cayenne, c’est à dire que l’agilité est surréaliste par rapport au gabarit et qu’il s’agit indiscutablement d’un des SUV les plus enthousiasmants du marché.

Avec cependant un gros bémol : tout l’arsenal nécessaire pour arriver à ce résultat est optionnel, notamment les roues arrière directrices (2 064 €), absolument cruciales. Sans elles, pas de miracle, les deux tonnes du Cayenne se ressentent à chaque virage. Mais si l’option est bien cochée, la facilité avec laquelle il avale les cordes et résiste au sous-virage est époustouflante. Corollaire, si vous comptez en profiter, il faudra envisager d’y associer les freins carbone-céramique (9 012 € sur les V6, aïe)… À défaut, chaque kilo de la voiture se rappellera là aussi à votre bon souvenir après seulement quelques virages.

Ce qui nous amène aux moteurs. Si vous en voulez un à la démesure du Cayenne Coupé, alors le Turbo s’impose. Le couple pharaonique du V8 (770 Nm) et sa bande-son de muscle car (doublée de la respiration du turbo façon Dark Vador) sont insolemment cohérents avec le gabarit et le poids de cette voiture. Si vous souhaitez avoir le meilleur aperçu du tempérament incisif, voire survireur, d’un des meilleurs SUV sportifs du marché, le Turbo est idéal.

Mais si ça ne figure pas parmi vos priorités – d’ailleurs soyons lucides, si c’est le cas vous avez tout intérêt à vous diriger vers une M5 ou une E63 AMG –, le Cayenne S est certainement le meilleur choix de la gamme avec son V6 de 440 ch. Ce moteur ne demande qu’à prendre des tours et chante étonnamment juste, y compris avec l’échappement sport. Pas de borborygmes et autres pétarades inutiles au lever de pied, ni de générateur de son électronique frelaté. Pour ne rien gâter, il est un peu plus léger que le V8 et tout aussi performant dans la vraie vie. Quant au V6 d’entrée de gamme, il est tout à fait recommandable mais manque tout de même du punch recherché par les clients de ce genre de bestiau.

Quel que soit le moteur, la porschitude de ce Cayenne Coupé transparaît dans le toucher de route, surabondant pour une voiture aussi familiale. De même, on ne louera jamais assez la précision et la progressivité des freins. Les gens qui ont mis au point cette voiture sont des vrais. Même s’ils auraient sans doute préféré plancher sur quelque chose dont le nom commence par GT.

À bord

Autant commencer à l’arrière, puisque c’est là que le Coupé diffère du Cayenne standard. Le toit y est 2 cm plus près du plancher et même si les assises ont été abaissées en conséquence, la garde au toit risque d’être un problème pour un passager de plus d’1,85 m. Sinon, R.A.S. Ah, si : si vous voulez cinq places, vous devrez renoncer à l’option toit carbone, qui fait partie d’un « Lightweight Sport Package » (rires).

Le coffre a perdu 145 l en standard et 170 l en configuration deux places. Avec 625 et 1 540 l dans ces configurations respectives, il reste très accueillant dans l’absolu, hormis le seuil de chargement un peu haut.

En pratique, le nombre de combinaisons de finitions et d’options est vertigineux. Vous pouvez caser du cuir ou de l’Alcantara partout sauf sur les vitres. Le pack Lightweight est associé à une sellerie à tartan qui n’est pas sans rappeler celle de la 911 R. Si ça, ce n’est pas de la provoc’… Bon, il faut reconnaître que l’ensemble a du cachet, surtout avec le volant Alcantara.

À l’avant, comme à bord d’un Cayenne normal, on retrouve un mélange de surfaces laquées et d’écrans et boutons tactiles. C’est un peu fastidieux au premier abord, mais au bout de quelques heures de pratique on y est comme chez soi. Le large écran central est particulièrement appréciable pour la navigation, même si le système infotrafic embarqué ne vaut pas un bon vieux Waze sur smartphone.

Toujours pour appâter le puriste, Porsche est resté fidèle au compte-tours analogique au milieu d’une instrumentation numérique intégralement configurable, doublée d’un affichage tête haute optionnel (1 476 €).

Budget

Configurer un Cayenne Coupé, c’est la migraine assurée. La première étape est de déterminer si vous voulez quatre ou cinq sièges, cette dernière configuration n’étant pas compatible avec le Lightweight Sport Package (et donc le toit en fibre de carbone). Mais si vous envisagez d’embarquer ponctuellement un passager supplémentaire, vous n’êtes sans doute pas à 22 kg près.

En plus de l’équipement du Cayenne standard, le Coupé a droit en série au pack Sport Chrono (incluant sélecteur de mode et launch control), à la suspension pilotée, aux radars de stationnement avant et arrière avec la caméra de recul, ou encore au toit panoramique. In fine, le surcoût est donc considérablement dilué.

Rassurez-vous, Porsche est toujours aussi radin sur l’équipement. Les freins céramique, les roues arrière directrices, le différentiel à vectorisation de couple, l’antiroulis actif et l’échappement sport sont tous optionnels, même sur un Turbo à 150 000 €. Prévoyez une quinzaine de milliers d’euros de supplément si vous y tenez (et vous y tenez, sinon vous n’envisageriez pas un Cayenne Turbo Coupé).

Pour « seulement » 2 064 €, les roues arrière directrices sont incontournables et, à choisir, ont l’effet le plus tangible au volant. Y compris sur les V6 qui n’ont ainsi plus grand chose à envier au Turbo en matière de dynamisme châssis. Néanmoins, il paraît alors sage de muscler les freins en conséquence si vous avez l’intention d’aller vérifier tout ça régulièrement, et ce même si le freinage carbone-céramique est l’une des options les plus coûteuses du catalogue (jusqu’à 9 012 € sur les V6).

Au moment de choisir entre les motorisations, inutile de vous préoccuper de la consommation : même si les V6 annoncent moins de 10 l/100 km, il est illusoire d’espérer s’en approcher à moins de ne faire que de l’autoroute. Mieux vaut oublier ce critère et embrasser la démesure intrinsèque du concept de SUV coupé en optant pour le plus rapide que votre banquier vous permette. Si vous privilégiiez des choses aussi triviales que l’habitabilité et le coffre, vous auriez pris un Porsche Cayenne standard. Ou un Skoda Kodiaq.

Verdict

Objectivement, quoi qu’on pense des lignes du Cayenne Coupé, il constitue un tour de force technique. Voilà encore un SUV obèse qui se conduit (presque) comme une voiture de sport. Si et seulement si vous avez coché les bonnes options châssis, attention.

Subjectivement ? À vous de voir. Si cette armada de gros SUV surbaissés vous est sympathique, alors c’est peut-être le Cayenne que vous attendiez depuis toujours, onze ans après l’arrivée du BMW X6.

À l’inverse, si cette mode vous donne la nausée, le Cayenne Coupé est tout aussi vain que vous l’imaginez : un Cayenne plus cher, moins spacieux, un tout petit peu moins performant et pas vraiment plus sportif dans la vraie vie. Alors que la Panamera Sport Turismo justifie son surcoût par un sens pratique sensiblement plus développé, le Cayenne Coupé tente tout simplement le contraire. Mais si ce genre d’auto vous parle, ces basses considérations ne seront pas un problème.

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