Je rentre du Mondial de l’Automobile. Vous savez, le Mondial de l’Auto de Paris. Probablement pour la dernière fois.

En arrivant sur le site du Parc des Expositions ce matin, j’ai fait comme d’habitude. Je suis entré par les grilles qui donnent sur la Place de la Porte de Versailles direction le Hall 1. Je m’étonne du nombre de camionnettes garées devant le hall et de l’agitation qui semble régner à l’intérieur… A priori, y’en a qui ne sont pas prêts, les stands sont encore en cours de montage. Boarf, quelques retardataires, ça n’est pas bien grave, j’entre et… non, je n’entre pas. Les portes battantes sont fermées. Toutes. Je longe le bâtiment à la recherche d’une entrée et, quand je la trouve, l’agent de sécurité me demande mon badge. Mon badge d’exposant pour… Equip’Auto, le salon de l’équipement qui ouvre ses portes demain.

Je sors mon portable et, dans mes mails, je cherche le plan du salon que j’ai reçu mais pas ouvert. Pas « pro » ? Peut-être, mais j’ai toujours préféré faire un premier tour en découvrant le salon non pas comme un journaliste, avec sa liste de stands et de conférences de presse programmés et son parcours minuté, mais comme un visiteur. Comme vous, ou comme moi plus jeune, quand j’étais impatient de venir découvrir toutes les nouveautés du salon sans les connaître à l’avance. Malheureusement, ce plaisir a disparu depuis de nombreuses années déjà. Depuis que, des semaines avant l’ouverture du Mondial, on pouvait découvrir chaque semaine dans Auto Plus, tous les 15 jours dans L’Auto-Journal ou tous les mois dans L’Automobile Magazine, les concepts et nouveaux modèles qui seraient dévoilés sur les stands. Et tout ça, c’était avant l’explosion d’internet. La faute à la presse ? Non, la faute aux constructeurs ! Si la presse a toujours chassé les scoops, ce sont bien les constructeurs qui ont, petit à petit, organisé les « fuites » ou les reveals en amont du Mondial, histoire de garder la main sur la communication, de prendre la parole en dehors du cadre, avant les autres. Et évidemment, la presse, nous, sommes ravis d’avoir des infos « en amont » même si, au final, dans ce cas on ne fait que servir le calendrier du constructeur. Résultat, envolée la magie de la découverte dans les allées du salon.

De son côté, le Mondial n’est pas irréprochable non plus. Le Mondial de l’Auto de Paris était le salon le plus visité au monde. C’est vrai. Ce titre, le Mondial s’en servait notamment pour pratiquer des tarifs… conséquents. Mais ce qui se dit moins, c’est que c’était aussi le salon automobile le plus long au monde. Près de 20 jours en comptant les journées presse. Un investissement gigantesque pour les constructeurs qui, en plus de l’emplacement, devaient faire des stands toujours plus dingues, toujours plus grands. Et qui dit grand stand dit grosses dépenses en frais de fonctionnement, hôtesses, forces de ventes (on est quand même là pour vendre des voitures), etc. Mais quand les constructeurs ont commencé à demander à réduire la durée pour réduire les coûts, le salon a tiré la langue car, en réduisant la durée, il y avait de gros risques de perdre le titre de salon le plus visité.

En 2016, le Mondial de l’Auto occupait sans forcer les Halls 1, 2.1, 2.2, 2.3, 3, 4, 5.1, 5.2 et 8 du Parc des Expositions de la Porte de Versailles. En 2018, l’organisation avait fini par baisser la durée à un peu moins de deux semaines mais l’entêtement de l’équipe précédente avait déjà laissé des traces, quelques constructeurs manquaient à l’appel et on avait perdu les Halls 2.1 et 8. 2020, pas de Salon, COVID oblige. Ce qui nous amène à cette année.

Le Mondial de l’Auto 2022 occupe les Halls 3, 4 et 6. Point barre. Si on veut être réaliste, cette édition ne se tient que grâce à la présence des constructeurs Français (Peugeot, DS, Renault, Dacia et Alpine) et… Chinois. Pas d’Allemands, pas d’Italiens, pas de Japonais, pas d’Anglais, pas de Suédois, pas d’Américains… Sauf Jeep, Stellantis leur a réservé un petit coin à côté de Peugeot  – mais pas trace d’Opel ou… Citroën ?!? – pour présenter l’Avenger 100% électrique. Et American Car City dont le stand est presque aussi grand que celui de Jeep mais légèrement moins éco-responsable 😉

Si Renault a joué le jeu en présentant le concept 4ever, réinterprétation de la 4L Trophy, je pense que le plus gros affront au Mondial vient de lui être infligé par Peugeot. Aujourd’hui 17 octobre 2022, 16h38, je reçois un mail intitulé Peugeot Inception Concept. Je me dis que j’ai dû rater quelque chose sur le stand Peugeot, puis je lis le communiqué : « Prochainement révélée : la Vision de Peugeot pour la future génération de voitures électriques. […] Au Mondial de l’Automobile de Paris, Linda Jackqon, CEO de Peugeot, a annoncé aujourd’hui qu’elle dévoilerait Peugeot Inception Concept dans les semaines à venir – la vision de la Marque au Lion pour la prochaine génération de ses voitures basées sur des plateformes conçues pour les motorisations électriques. » Pardon, je résume : la patronne de Peugeot annonce au Mondial, la veille de l’ouverture au publique, que la marque révèlera un concept dans les semaines à venir. Merci pour les visiteurs qui auront fait le déplacement et payé leurs places.

Vous avez vu le logo de cette année ? Une voiture évanescente… En d’autres termes une voiture qui part en fumée. Était-ce un message caché, ou est-ce un pur hasard ? Au moins, la fumée est pleine de couleurs, ça garde un côté joyeux…